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Est-ce-qu'on s'endurcit grâce aux comportements humiliants?

Il existe encore en 2023 une croyance tenace et largement répandue qui veut que l'enfant apprendra mieux (à l'école, à la maison, au sport) si on le pousse et qu'on n'hésite pas à avoir recours à l'humiliation pour "lui permettre de s'endurcir".

Les adultes qui portent cette croyance la fondent souvent sur leur propre expérience à laquelle ils ont "survécu". On dirait que c'est une forme de test de motivation à faire passer à l'enfant. Si il y retourne, c'est qu'il en redemande!

A noter que dans nos vies d'adultes, on peut encore rencontrer certains managers qui continueront sur cette lancée... :-)



Voyons ce qui se passe du côté du cerveau d'un enfant qui subit toute forme de stress dans l'apprentissage.

Je vais pour cela tirer quelques extraits de l’article de la CAIRN, reprenant "le cerveau et l’enfant" du Dr Catherine Guéguen, 2017.


"La recherche scientifique en a fourni la preuve : la relation de bienveillance est une condition nécessaire au bon développement du cerveau des enfants. Catherine Gueguen, pédiatre spécialisée dans l’éducation, passe en revue les différents processus qu’elle favorise."


Rappelons que le cerveau humain met 25 ans à se former. Il restera malléable grâce à la neuroplasticité jusqu'à la fin de sa vie. Cependant, les expériences de l'enfance laissent des traces déterminantes.


"En effet, le cerveau de l’enfant est fragile, malléable et immature. Chaque expérience affective ou relationnelle modifie en profondeur ses neurones et leur myélinisation, ses synapses, ses molécules cérébrales, ses structures et circuits cérébraux, et même l’expression de certains gènes."


"Le cortisol est extrêmement toxique pour le cerveau de l’enfant.

Un taux élevé ou prolongé de cette hormone peut détruire des neurones dans des zones essentielles du cerveau : cortex préfrontal, hippocampe, corps calleux, cervelet et conduire, à terme, à de nombreux troubles du comportement (agressivité), à de l’anxiété, à des difficultés d’apprentissage."


Le cortisol est l'hormone provoquée par le stress.


"L’hippocampe est l’une des structures cérébrales dévolues à la mémoire et à l’apprentissage. Quand on encourage l’enfant, son hippocampe augmente de volume, ses neurones et ses synapses se développent mieux, par l’intermédiaire du facteur neurotrophique.

 C'est le facteur de croissance des neurones: il apprend mieux et mémorise davantage. En revanche, quand l’hippocampe est endommagé par un trop fort taux de cortisol, la mémoire et les capacités d’apprentissage sont altérées."


Je trouve cette partie absolument fascinante. Cela veut dire concrètement que les expériences répétées que vit l'enfant vont modifier physiquement la structure de son cerveau!

Je fais un aparté pour ceux que cela intéresse: les recherches scientifiques, notamment menées grâce à Matthieu Ricard, montrent que l'hippocampe du cerveau du méditant est plus développé que chez les adultes qui ne méditent pas...



Quand un enfant entend : « Tu n’y arriveras pas, tu en es incapable », la peur de l’échec l’inhibe totalement, il n’ose pas prendre de risques et vivre pleinement.


Que se passe-t-il dans le cerveau quand l'enfant est encouragé dans ses apprentissages?


"Quand l’enfant entreprend une activité avec enthousiasme, il sécrète de la dopamine, molécule du plaisir à vivre et de la motivation, et décuple ses facultés d’apprentissage.

Aussi est-il important d’encourager l’enfant à explorer, expérimenter, découvrir, créer, vivre intensément, en s’adaptant à son âge, bien sûr, et à ses envies ; de l’accompagner dans ses efforts pour qu’il ne se décourage pas, malgré les difficultés, les erreurs, les échecs ; de lui faire confiance et de lui laisser un espace de liberté pour qu’il tâtonne, se trompe et rebondisse, apprenne à se connaître et à faire les choix qui lui conviennent."


J'ai envie de rajouter ici qu'il est important non seulement d'avoir confiance en lui, mais de lui témoigner cette confiance. Savoir accepter et valoriser l'apprentissage par l'erreur, c'est mettre l'enfant en sécurité. Il adoptera une attitude saine par rapport à ses apprentissages qui lui permettra de développer sa confiance en lui.


"L’ocytocine est une molécule de l’empathie, de l’amour, de l’amitié. Elle est sécrétée par celui qui fait preuve d’une attention bienveillante, mais aussi par celui qui la reçoit. Elle agit sur les structures cérébrales qui nous permettent de décrypter l’expression des yeux, du visage et… renforce l’empathie ! Un cercle vertueux. Elle est indispensable pour être pleinement vivant et heureux. Sécréter de l’ocytocine procure un sentiment de bien-être, d’apaisement et favorise la sociabilité, des relations amicales et amoureuses satisfaisantes.

Adopter une attitude bienveillante et chaleureuse envers un enfant stimule aussi sa sécrétion de dopamine, d’endorphines et de sérotonine, ce qui fait maturer son cortex orbito-frontal et lui permet d’acquérir un sens moral et d’apprendre à faire des choix."


Ce point très important invite les adultes que nous sommes à nous interroger sur les mécanismes de répétition que nous adoptons sans y réfléchir. Il peut nous arriver d'avoir les mêmes réflexes que nos éducateurs (parents, enseignants, coaches) alors que nous ne les avons pas forcément trouvés adaptés. Et si nous les avons validés, j'espère que l'article du Dr Guéguen nous invitera tous à réfléchir en profondeur sur le bienfondé de ce que nous avons peut-être reçu et la nécessité de le perpétuer.

Je peux ici citer mon exemple: j'ai grandi dans l'univers de la danse classique, à un niveau qui avait des exigences très dures. j'ai eu des professeurs bienveillants, d'autres non, certains oui mais pas tout le temps. J'ai accepté pendant longtemps que c'était la dureté, les jugements, les remarques désagréables qui faisaient grandir. Il m'a fallu du temps, de la réflexion, des rencontres et des lectures pour me rendre compte que c'était un chemin très dommageable.


Il ne faut pas confondre exigence et maltraitance.

Cette confusion est d'autant plus dangereuse qu'elle amènera l'enfant à accepter de se maltraiter lui-même pour performer. J'accompagne les blessures de ces adultes au quotidien...


"Par ailleurs, les adultes sont toujours un exemple pour l’enfant, qui les imite via ses neurones miroirs. S’il les voit crier et perdre leurs moyens dans les situations émotionnelles fortes, il reproduit ensuite ce comportement. Il se met en colère, comme eux, adopte des comportements agressifs et peine à réguler ses impulsions et ses émotions."


Tout comportement ou parole qui rabaisse, critique, procure un sentiment d’humiliation ou de honte, qui fait peur, isole, rejette.


Le brillant article du Dr Guéguen nous éclaire sur l'impact physiologique des humiliations répétées sur le cerveau de l'enfant. Un adulte qui subirait le même traitement réagirait à peu près de la même façon, devant supporter en plus ses mémoires émotionnelles et traumatiques qui seront ravivées aussi bien dans notre cerveau que notre corps.


Il appartient à chacun d'entre nous d'être (autant que possible), un passeur de bienveillance, pour protéger les jeunes générations et permettre aux adultes de s'épanouir dans des relations qui portent.


Si vous voulez en savoir plus, je serai ravie d'échanger avec vous!









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